Défense

Défense européenne : mineurs incapables sous tutelle diplomatique

Régis Ollivier – Le 04 avril 2025

Illustration lecolonel.net

À la lecture du dernier billet de Nicolas Gros-Verheyde, journaliste chevronné et Directeur de B2 – Bruxelles2, les bras m’en sont tombés. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir vu passer des inepties dans ma longue carrière. Mais là, on touche au cœur d’une tragédie bien européenne : la défense de l’Union Européenne est tenue en laisse par la diplomatie, avec les ministres de la Défense relégués au rang de figurants dociles.

Tenez-vous bien : à Varsovie, la réunion informelle des ministres de la Défense de l’UE — qui devrait être un moment clé dans ce contexte de tensions croissantes avec la Russie, d’instabilité au Moyen-Orient et de retour du spectre terroriste — est bouclée entre 9h et 14h. Deux malheureuses sessions de 2h30 chacune. Autant dire, une cour de récréation de luxe.

Mais le plus sidérant, c’est l’aveu d’impuissance institutionnalisée : les ministres de la Défense n’ont même pas le pouvoir d’adopter des décisions au nom de pays. Tout passe par les ministres des Affaires étrangères. Même les textes concernant uniquement la défense. On marche sur la tête.

Les militaires, eux, restent au garde-à-vous, le doigt sur la couture du pantalon. Quant aux ministres, ils regardent ailleurs ou se taisent, sans doute trop heureux d’éviter le poids des responsabilités. Cette infantilisation programmée — cette castration politique — a un nom : la peur. Peur de froisser l’OTAN, peur de se brouiller avec Washington, peur surtout d’assumer une autonomie stratégique européenne.

Je suis curieux de connaitre la pensée du général-député Christophe Gomart sur ce hold-up politique. Lui qui habituellement, au parlement européen, est une voix forte, libre et sans concession. Je l’interpellerai sur ce texte, ici même.

L’Europe de la défense ? Un mirage. Un slogan creux. Une énième incantation que l’on brandit pour se donner bonne conscience, pendant que les vrais dossiers se règlent ailleurs, dans d’autres capitales, avec d’autres priorités.

Il est temps de rendre à la Défense sa légitimité, son autorité, sa voix. Et de sortir les ministres concernés du bac à sable diplomatique dans lequel ils ont été volontairement relégués.

#Europedeladefense #UnionEuropeenne #Parlementeuropeen

Armées

Union européenne : entre le marteau russe et l’enclume ultraconservatrice… l’heure des choix

Régis Ollivier – Le 22 mars 2025

On braque nos regards vers l’Est, obnubilés par les bruits de bottes russes. On gonfle les budgets militaires, on aligne chars et Rafale, persuadés que le danger est là, frontal, palpable. Mais pendant que l’Europe se blinde, un autre front s’ouvre discrètement, bien plus insidieux : celui des idées. Derrière les sourires policés des think tanks américains et des groupes ultraconservateurs européens, se trame un projet précis, méthodique, visant à dépecer l’Union européenne de l’intérieur. Virginie Raisson-Victor lève le voile sur cette manœuvre. Le Colonel salue l’analyse et pousse la réflexion : il est temps que l’Europe réarme aussi ses valeurs, sous peine de se retrouver sans défense là où ça compte le plus.

Résumé du texte de Virginie Raisson-Victor :

Trois ans après l’invasion de l’Ukraine, l’Europe prend enfin conscience de la menace que représente la volonté de Vladimir Poutine de restaurer l’empire russe. Dans le même temps, les positions de Donald Trump fragilisent les alliances transatlantiques, poussant l’UE à envisager une défense plus autonome. Tandis que les investissements dans l’industrie de l’armement s’accélèrent, Virginie Raisson-Victor alerte sur une autre menace : celle d’un projet coordonné visant à fragmenter l’Europe de l’intérieur.

Au cœur de cette menace, la Heritage Foundation, influent think tank conservateur américain, porte un projet (le « Projet 2025 ») soutenant un retour à des nations souveraines, affaiblissant les institutions supranationales européennes. En mars, lors d’une réunion avec des groupes d’extrême droite européenne comme Ordo Iuris, les grandes lignes d’une stratégie déstabilisatrice auraient été définies : soutien aux partis populistes, contrôle des médias, lobbying agressif sur les questions migratoires, énergétiques et de souveraineté.

L’auteur appelle à ne pas se limiter à un réarmement militaire, mais à construire un véritable projet de civilisation européen, fondé sur les valeurs démocratiques, l’État de droit, le pluralisme et les libertés fondamentales, valeurs que ce courant ultraconservateur considère comme des concepts « banals et nébuleux ».

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