Europe

Situation sécuritaire en Europe : mise à jour au 20 octobre 2025

Régis Ollivier – Le 21 octobre 2025

Illustration lecolonel.net

Contexte général

Le conflit entre l’Ukraine et la Russie continue d’évoluer vers une phase plus lourde en ramifications européennes, notamment en matière de défense, de sanctions, de dépendances énergétiques, et de risques d’escalade vers l’OTAN. L’Europe se retrouve à la fois soutien de l’Ukrainecible de menaces russes, et consciente de ses lacunes de défense. Le possible désengagement américain – explicitement évoqué par Donald Trump – alimente une inquiétude croissante dans les capitales européennes.

1️⃣ Renforcement du flanc oriental et des drones

  • Le 16 octobre 2025, la Commission européenne a présenté quatre projets phares de défense destinés à compléter les capacités de l’OTAN, dont la European Drone Defence Initiative et le programme Eastern Flank Watch, pour protéger les frontières orientales et contrer la multiplication des incursions russes.
    Source : Reuters, 16 oct. 2025
  • Le Royaume-Uni a décidé d’autoriser ses troupes à abattre tout drone identifié comme hostile à proximité de bases militaires, signe d’une militarisation progressive du ciel européen.
    Source : The Guardian, 20 oct. 2025
  • Selon l’Institute for the Study of War (ISW), la Russie intensifie ses frappes de drones et missiles de croisière, testant la réactivité et la saturation des défenses européennes.

2️⃣ Soutien européen à l’Ukraine et usage des actifs gelés russes

  • Les dirigeants européens sont sur le point d’adopter un plan de 140 milliards € destiné à l’Ukraine, financé par les avoirs gelés de la Banque centrale de Russie.
    Source : The Guardian, 20 oct. 2025
  • Kaja Kallas, cheffe de la diplomatie européenne, a appelé à des mesures urgentes pour la sécurité énergétiquede l’Ukraine, et à renforcer la traque de la « fleet ombre » russe qui contourne les sanctions pétrolières.
    Source : Reuters, 20 oct. 2025

3️⃣ Tensions transatlantiques et affaiblissement potentiel de l’OTAN

  • Après une rencontre tendue entre Donald Trump et Volodymyr Zelenskyy,
    les dirigeants européens ont publiquement réaffirmé leur soutien à l’Ukraine pour éviter toute rupture de front occidental.
    Source : Financial Times, 18 oct. 2025
  • Cette tension illustre le risque d’un désengagement américain.
    Les déclarations de Trump sur une « OTAN paresseuse » et « inutile » sèment le doute quant à la garantie de défense collective.

4️⃣ Évaluation stratégique pour l’Europe

État de la menace

  • Les attaques hybrides et cyber offensives russes se multiplient sur le territoire européen.
  • Le flanc oriental (Pays baltes, Pologne, Roumanie) demeure la zone la plus vulnérable à un incident militaire direct.
  • L’Ukraine subit une campagne de drones et missiles ciblant son infrastructure énergétique et logistique, avec des répercussions sur la stabilité électrique et économique de l’Europe.

Capacité européenne

  • L’Europe s’est engagée à porter ses dépenses de défense à 5 % du PIB d’ici 2035.
    Plusieurs États (France, Pologne, Finlande) dépassent déjà les 3 %.
  • Le développement de boucliers anti-drones et anti-missiles constitue une priorité à court terme.
    AP News, 16 oct. 2025

Dépendance persistante

  • Les Européens demeurent dépendants des capacités américaines en matière de renseignement, de logistique, et surtout de dissuasion nucléaire.
  • Une réduction du parapluie américain imposerait un effort financier colossal et un changement doctrinal majeur.

5️⃣ Implications géopolitiques

  1. Retour de la dissuasion territoriale : l’Europe réarme massivement mais reste en transition.
  2. Autonomie stratégique : l’UE commence à agir seule — via le drone wall, les investissements SAFE, et le programme ReArm Europe.
  3. Fragilisation de l’axe transatlantique : les positions divergentes sur l’Ukraine et la Russie affaiblissent l’unité de l’OTAN.
  4. Pression sur l’industrie européenne : le besoin d’une base industrielle de défense commune devient vital.
  5. Risque d’incident : la multiplication des interceptions de drones ou d’avions russes au-dessus de la Baltique augmente le risque d’un engrenage militaire non voulu.

6️⃣ Recommandations pour l’Europe

  • Accélérer la mise en œuvre des projets communs (drone-wallair/space shield).
  • Renforcer l’industrie européenne de défense via des commandes groupées et des chaînes d’approvisionnement intégrées.
  • Développer la coopération logistique et opérationnelle entre États membres.
  • Préparer un scénario d’autonomie militaire en cas de retrait partiel ou total des États-Unis.
  • Conditionner l’aide à l’Ukraine à des objectifs stratégiques clairs pour la sécurité européenne.

Conclusion

Au 20 octobre 2025, la guerre est plus que jamais à la porte de l’Europe. Les bruits de bottes se sont transformés en bruits de drones, et les capitales européennes prennent enfin conscience qu’aucun parapluie américain ne saurait remplacer une défense commune efficace.

La question n’est plus de savoir si l’Europe doit se défendre seule, mais dans combien de temps elle en aura réellement les moyens.

Rédigé par : Koios – pour le Colonel Régis Ollivier

© 2025 – Analyse stratégique européenne actualisée au 20 octobre 2025

Défense

Défense européenne : mineurs incapables sous tutelle diplomatique

Régis Ollivier – Le 04 avril 2025

Illustration lecolonel.net

À la lecture du dernier billet de Nicolas Gros-Verheyde, journaliste chevronné et Directeur de B2 – Bruxelles2, les bras m’en sont tombés. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir vu passer des inepties dans ma longue carrière. Mais là, on touche au cœur d’une tragédie bien européenne : la défense de l’Union Européenne est tenue en laisse par la diplomatie, avec les ministres de la Défense relégués au rang de figurants dociles.

Tenez-vous bien : à Varsovie, la réunion informelle des ministres de la Défense de l’UE — qui devrait être un moment clé dans ce contexte de tensions croissantes avec la Russie, d’instabilité au Moyen-Orient et de retour du spectre terroriste — est bouclée entre 9h et 14h. Deux malheureuses sessions de 2h30 chacune. Autant dire, une cour de récréation de luxe.

Mais le plus sidérant, c’est l’aveu d’impuissance institutionnalisée : les ministres de la Défense n’ont même pas le pouvoir d’adopter des décisions au nom de pays. Tout passe par les ministres des Affaires étrangères. Même les textes concernant uniquement la défense. On marche sur la tête.

Les militaires, eux, restent au garde-à-vous, le doigt sur la couture du pantalon. Quant aux ministres, ils regardent ailleurs ou se taisent, sans doute trop heureux d’éviter le poids des responsabilités. Cette infantilisation programmée — cette castration politique — a un nom : la peur. Peur de froisser l’OTAN, peur de se brouiller avec Washington, peur surtout d’assumer une autonomie stratégique européenne.

Je suis curieux de connaitre la pensée du général-député Christophe Gomart sur ce hold-up politique. Lui qui habituellement, au parlement européen, est une voix forte, libre et sans concession. Je l’interpellerai sur ce texte, ici même.

L’Europe de la défense ? Un mirage. Un slogan creux. Une énième incantation que l’on brandit pour se donner bonne conscience, pendant que les vrais dossiers se règlent ailleurs, dans d’autres capitales, avec d’autres priorités.

Il est temps de rendre à la Défense sa légitimité, son autorité, sa voix. Et de sortir les ministres concernés du bac à sable diplomatique dans lequel ils ont été volontairement relégués.

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