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LinkedIn et l’IA : une pensée critique en danger

Régis Ollivier – Le 16 avril 2025

Vu passer sur LinkedIn, sans filtre ni nuance : “L’IA est le caniveau du web. Les nuls ont pris le pouvoir. L’IA est faite pour eux ! CQFD.” Ah, LinkedIn… Ce réseau dit professionnel où chacun devient tour à tour sociologue, économiste, ou expert en intelligence artificielle. Dernière tendance : taper sur l’IA à grands coups de formules creuses pour masquer son propre désarroi face au changement.

1. Oui, l’IA a une approche statistique. Et alors ?
Elle synthétise, structure, reformule. Ce n’est pas “la réponse la plus facile”, c’est la plus probable selon le contexte. Encore faut-il savoir poser une bonne question — un art oublié par ceux qui confondent vitesse et précipitation.

2. L’IA ne remplace pas le jugement humain.
Dire qu’elle “se trompe dans 90 % des cas” est aussi absurde que d’affirmer qu’un livre est faux parce que le lecteur n’y comprend rien. L’IA propose, c’est à l’humain de discerner. Le problème, ce n’est pas l’outil, c’est son usage.

3. “Les nuls ont pris le pouvoir” ? Voilà qui suinte le mépris.
Ce genre de phrase trahit une peur panique : celle d’être dépassé, d’avoir raté le virage, d’être remplacé… non par une machine, mais par ceux qui savent s’en servir.

4. L’IA dans l’administration ? Bonne nouvelle, à condition de l’encadrer.
Loin des fantasmes, elle peut alléger les tâches répétitives, accélérer le traitement de dossiers, améliorer l’accès à l’information. Non, ce ne sera pas magique. Mais non, ce ne sera pas un désastre. Ce sera un outil. Ni plus, ni moins.

Alors non, l’IA n’est pas le caniveau du web.
Mais LinkedIn, lui, devient parfois le caniveau de la pensée critique.

À force de simplifier à outrance, on ne fait pas œuvre de pédagogie : on participe à l’effondrement intellectuel qu’on prétend dénoncer.

Et ça, c’est autrement plus inquiétant.